Peut-on encore brûler des livres ?

L’autodafé reste un sujet qui choque compte tenu de sa dimension symbolique et historique. En 2021, le Canada en a fait les frais quand des livres accusés de propager des stéréotypes sur les autochtones avaient été brûlés dans des écoles. Au total, Radio Canada parle de 5 000 livres détruits, dont Tintin et Astérix (lire l’article ici).

Depuis, on ne cesse de parler de censure de livres sur le continent américain. Le nombre de livres retirés des fonds des bibliothèques continue d’augmenter, en raison d’une idéologie jugée trop LGBT ou d’une prétendue influence néfaste de la magie et des sortilèges d’Harry Potter sur un jeune public. Les exemples sont nombreux. Hélas…

Pour lutter contre ces censures, l’éditeur Penguin Random House s’est rapproché de l’association PEN America, qui protège la liberté d’expression, plus particulièrement en littérature. Avec la contribution de Margaret Atwood, très impliquée contre la censure, ils ont créé The Unburnable Book

Le roman dystopique de Margaret Atwood, best seller paru en 1985, porté par la série du même nom et publié en France chez Robert Laffont, est toujours répertorié comme le septième livre le plus contesté en raison du blasphème, de la vulgarité et des connotations sexuelles, selon l’Association américaine des bibliothèques.

Un exemplaire unique ininflammable a été créé, l’occasion pour Margaret Atwood de brûler un de ses propres livres… et d’échouer ! Margaret Atwood s’exprime sur ce sujet dans un communiqué : « The Handmaid’s Tale a été interdit à plusieurs reprises, parfois par des pays entiers, comme le Portugal et l’Espagne à l’époque de Salazar et des franquistes, parfois par des commissions scolaires, parfois par des bibliothèques. Espérons que nous n’atteindrons pas le stade des autodafés de livres, comme dans Fahrenheit 451. Mais si nous y arrivons, espérons que certains livres s’avéreront ininflammables – qu’ils voyageront sous terre, comme les livres interdits en Union soviétique. »

Le livre,  fabriqué à Toronto par l’atelier spécialisé en arts graphiques et reliure The Gas Company, contient uniquement des matériaux ignifuges : de la jaquette imprimée sur du Cinefoil noir (un matériau de protection thermique en aluminium) à la reliure cousue de fils de nickel…. tout a été pensé pour résister aux flammes de la censure.

Cet exemplaire unique a été vendu aux enchères par Sotheby’s, ce 7 juin 2022. Estimé entre 50.000 et 100.000 $, le livre a finalement été emporté pour 130.000 $, une somme intégralement versée au PEN America pour sa lutte contre la censure, aux États-Unis et ailleurs (lire l’article ici)

Finalement, s’il est possible de créer des livres ininflammables, on peut annoncer la fin des autodafés… mais pas forcément la fin des censures !

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