Basé à Madrid, le collectif Luz Interruptus (« Lumière interrompue ») est un mouvement artistique anonyme et protestataire. Il travaille avec des matériaux simples, humbles : sacs plastiques, bassines… pour créer des installations ayant pour vocation de dénoncer. Elément central de l’installation, la lumière (des diodes, des lampes, des lumières incandescentes rouges, bleues, blanches à halo dans la nuit) est leur signe distinctif :« Nous utilisons la lumière comme matériau de base et l’obscurité comme une toile. »
L’une de leurs installations les plus prisées se nomme « Literature vs. Traffic » : une installation d’ores et déjà réalisée illégalement dans les rues de Madrid et de New-York et légalement dans les rues de Melbourne. Cette fois, c’est en tant qu’invité à l’occasion de la Nuit Blanche que le collectif a oeuvré dans les rues de Toronto en octobre 2016. Cette installation dénonce la place accordée à la voiture dans des centre-villes de plus en plus saturés : « Nous voulons que la littérature pousse les rues et parte à la conquête des espaces publics en offrant gratuitement à ces passants un lieu sans circulation qui, pendant quelques heures, succombera à l’humble pouvoir de l’écrit. »
10 000 livres ont été utilisés à cette occasion, donnés par l’Armée du Salut. Dans chaque livre, une petite lumière a été placée. L’installation a été réalisée en 12 jours grâce à 50 bénévoles. Pendant la nuit du 1er octobre, les livres ont remplacé les voitures sur la rue Hagerman, au centre-ville de Toronto. Chaque passant était libre d’en prendre ou d’en rajouter. Et certains y ont découvert des trésors de littérature. Mais c’est surtout la mémoire de ces livres qui ont pris le temps d’une nuit, un espace d’habitude envahi par les voitures, qui restera ancrée dans les esprits.